lundi 31 mai 2010

Eloge de la fuite

Dans son ouvrage Éloge de la fuite, le biologiste Henri Laborit rapporte que, confronté à une épreuve, l'homme ne dispose que de trois choix :
1. Combattre. 2. Ne rien faire. 3. Fuir.
  • COMBATTRE : c'est l'attitude la plus naturelle et la plus saine. Le corps ne subit pas de dommages psychosomatiques. Le coup reçu est transformé en coup rendu. Mais cette attitude présente quelques inconvénients. On entre dans une spirale d'agressions à répétition. On finit toujours par rencontrer quelqu'un de plus fort qui vous met K-O.
  • NE RIEN FAIRE : c'est ravaler sa rancœur et agir comme si l'on avait pas perçue l'agression. C'est l'attitude la mieux admise et la plus répandue dans les sociétés modernes. Ce qu'on appelle l' "inhibition de l'action". On a envie de casser la figure à l'adversaire, mais étant donné qu'on a conscience du risque de se donner en spectacle, de prendre des coups en retour et de rentrer dans cette spirale d'agression, on ravale sa rage. Dès lors, ce coup de poing qu'on n'inflige pas à l'adversaire, on se l'assène à soi-même. Dans ce type de situation fleurissent des maladies psychosomatiques : ulcères, psoriasis, névralgies, rhumatismes...
  • La troisième voie est LA FUITE. Il en existe de plusieurs sortes : La fuite chimique : alcool, drogue, tabac, antidépresseurs, tranquillisants, somnifères. Elle permet d'effacer ou tout au moins d'atténuer l'agression subie. On oublie. On délire. On dort. Donc ça passe. Mais ce type de fuite dilue aussi le réel, et, peu à peu, l'individu ne supporte plus le monde normal. La fuite géographique : elle consiste à se déplacer sans cesse. On change de travail, d'amis, d'amants, de lieux de vie. Ainsi on fait voyager ses problèmes. On ne les résout pas pour autant, mais on leur fait changer de décors, ce qui est déjà en soi plus rafraîchissant. La fuite artistique, enfin : elle consiste à transformer sa rage, sa colère, sa douleur en oeuvres d'art, films, musiques, romans, sculptures, tableaux... Tout ce qu'on ne s'autorise pas à clamer, on le fait dire à son héros imaginaire. Cela peut ensuite produire un effet de catharsis. Ceux qui verront les héros venger leurs propres affronts bénéficieront aussi de l'effet.

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